The Naked City devait initialement être exposé aux côtés de quatre autres plans psychogéographiques de Paris à la galerie Taptoe à Bruxelles en 1957. Evoquant les premières métagraphies réalisées par Debord quelques années auparavant, cette carte est le fruit du détournement, « méthode de propagande » phare des lettristes puis des situationnistes : créée à partir des fragments découpés des plans d’un Guide Taride de Paris, la carte emprunte son titre au film éponyme réalisé par Jules Dassin en 1948, lui-même intitulé en référence à l’ouvrage du photographe Weegee consacré à la rue new-yorkaise en 1945. Editée en 1957 avec le Guide Psychogéographique de Paris. Discours sur les passions de l’amour par le MIBI (Mouvement International pour un Bauhaus Imaginiste) puis dans l’ouvrage Pour la forme d’Asger Jorn l’année suivante, The Naked City illustre la notion centrale en psychogéographie de « plaques tournantes », sorte de « carrefours » à partir desquels plusieurs pentes psychogéographiques symbolisées par des flèches peuvent être empruntées. Debord compare ces nœuds aux « illustrations, pour les livres des très jeunes écoliers, où une intention didactique fait réunir en une seule image un port, une montagne, un isthme, une forêt, un fleuve, une digue, un cap, un pont, un navire, un archipel ». En mars 1956, les lettristes avaient identifié lors d’une dérive la Rotonde de la Villette comme « plaque tournante » entre les pentes psychogéographiques du canal Saint-Martin, du boulevard de la Chapelle, de la rue d’Aubervilliers et du canal de l’Ourcq. Parmi les plaques tournantes représentées sur la carte, se reconnaissent notamment le jardin du Luxembourg ; l’axe entre le Palais Royal au Nord et la Place de l’Institut au Sud, avec le Palais du Louvres pour centre ; le quartier de l’Eglise Saint-Merri ; La rue de Seine ; le boulevard Saint-Germain ; la rue Mazarine...
Gilles Rion