François Roche trace dans son manifeste L’ombre du caméléon (1994) sa conception d’une architecture privilégiant les faits matériels, physiques et climatiques. La cartographie se substitue au travail traditionnel de calque, le territoire se substitue au plan, la situation au site, le furtif à l’objet fixe. Son architecture s'oriente vers l’hybridation et l’« hyperlocalisme » pour distordre le réel et en faire émerger la singularité la plus prégnante. Roche commence à utiliser les techniques numériques en 1996, moment où l’agence part pour l’île de la Réunion puis l’Afrique du Sud. Les projets alors conçus (Route du Maïdo ; Musée-Mémorial de Soweto ; Port-abri de Sainte-Rose) procèdent d'hybridations et de distorsions à partir de photographies de l’environnement numérisées puis déformées et retravaillées. Le travail de Roche s'ouvre à une architecture déceptive : la Maison Barak (Sommières, 2001, réalisé), (Un) Plug Building, Tour EDF, Paris, 2001-2003, le musée d’art contemporain de Bangkok (Dustyerelief F/B-mu, Bangkok, 2002), Mosquito bottleneck (2003), le Jardin des délices terrestres (2008) exacerbent leur contexte, quel qu'il soit, pour s'y fondre littéralement. D'autres projets récents intègrent un processus d'autodétermination via les nouvelles technologies : I've heard about (2005) par exemple, simule un processus de bio-urbanisme dont l'algorithme constructif intègre dans ses données le stress individuel et collectif comme un virus. Tous ces projets témoignent d'une pensée qui réfère à l'art, la philosophie, la génétique, la science-fiction, qui s'inspire des nanotechnologies ainsi que de la bio-robotique et qui se traduit avec le même regard acerbe dans des écrits, des conférences et des projets.
Après des études d’architecture à Versailles, François Roche (Paris, 1961) fonde son agence à Paris en 1989. Il multiplie les collaborations, ce dont témoigne le nom changeant de l’agence alors en perpétuelle mutation. Ces differentes dénominations, BoyerRoche / R,DSV & Sie / R&Sie(n), actuellement Mindmachinemyths, sont regroupées sous le patronyme New-Territories, identifié par un avatar Transgenre, qui portraitise non sans ambiguité son studio d’architecture afin selon lui de questionner, entre autre, la notion d’auteur. Il a été principalement associé à Stéphanie Lavaux, artiste (Saint-Denis de la Réunion, 1966), diplômée des Beaux-Arts de Paris (1990), de 1993 à 2010 ; à Camille Lacadee, architecte (Bordeaux, 1986), de 2011 à 2016 ; ainsi qu’à Toshikatsi Kiuchi (Japon, 1978) ; Jean Navarro ; Benoit Durandin ; Stephan Henrich ; Thibaut Boyer.
Roche mène également une activité d’enseignant : TU/Vienne, 2002 ; Bartlett School, Londres, 2000-01 ; Columbia, New York, 2006-2014 ; USC, Los Angeles, 2009-2011, RMIT depuis 2011 et de conférencier à travers le monde.
Régulièrement l’objet de publications, ses projets ont été présentés lors de nombreuses expositions : Biennales de Venise (1990, 1996, 2000, 2004, 2008, 2010, 2014, 2018) ; Archilab (1999, 2001, 2003) ; Architecture non standard, Centre Pompidou, Paris, 2003 ; MAM, I’ve heard about, Paris, 2005 ; Biennale de Chicago, 2015 ; Istanbul, 2016 ; eILe Pr_FAIRE la FICTION, Frac Centre-Val de Loire, Orléans, 2016-2017 ; Bangkok, 2018 ; Echigo-Tsumari (2002, 2018) ; Singapour, 2006 ; ainsi qu’au SFMOMA, San Francisco ; Barbican et Tate modern, Londres ; Louisiana Museum, Danemark ; et Le laboratoire, “une architecture des humeurs”, Paris, 2010).